Le musée en mémoire de Bourvil
André Raimbourg, dit Bourvil, aurait eu 100 ans cette année.
Un jeune instituteur de Boussu-Lez-Walcourt entretient sa mémoire dans un étonnant petit musée qui abrite une magnifique collection.
Petite visite.
Il est tombé dedans quand il était petit, dit-on parfois pour évoquer la passion d’un collectionneur. Cyril Forthomme avait plus exactement huit ans quand il a été scotché par le personnage principal d’une pièce de théâtre qui passait à la télévision, à l’occasion des fêtes de fin d’année. Cette pièce, c’était La Bonne Planque, où Bourvil joue le rôle d’un paisible fonctionnaire du ministère de l’Agriculture, aux prises avec deux gangsters et deux jeunes femmes très avenantes. Dans la foulée, la grand-mère de notre collectionneur lui fait écouter quelques disques de Bourvil où sont consignés quelques tubes inoxydables, dont par exemple Salade de fruits ou La Tactique du gendarme. Et voici le virus inoculé, d’autant que le gamin aime bien chanter en public.
C’est en 2003 que va véritablement débuter la collection. Disques, cassettes vidéo, affiches de cinéma, photos, article de presse, partitions musicales,… La petite entreprise prend vite de l’ampleur, car notre collectionneur ne ménage pas sa peine, notamment en prenant contact avec les personnes, acteurs, comédiens et techniciens, qui ont côtoyé Bourvil au cours de sa carrière de comédien, d’humoriste, de chanteur et bien sûr d’acteur. Cela a permis parfois de recueillir des témoignages écrits qui vont tous dans le même sens : Bourvil était quelqu’un de gentil, de modeste, de tendre, qui cultivait l’humour et la fantaisie au quotidien. Cyril Forthomme entre aussi en contact avec les deux fils de Bourvil, Dominique et Philippe, qui accueillent avec bienveillance cet intérêt du jeune Belge pour la carrière de leur père. D'autres membres de la famille lui ont offert quelques précieux documents comme du papier à lettre ou photographies. Le maire de Prétot-Vicquemare a aussi offert une copie de l'acte de naissance de Bourvil.
Il y a 14 ans, le jeune collectionneur a décidé de squatter quelques pièces de la maison de ses grands-parents pour les transformer en musée qui s’est très vite enrichi. Le rez-de-chaussée est occupé par tout ce qui concerne les six opérettes, les deux pièces de théâtre, les chansons (360 au total) et les souvenirs de famille. A l’étage, ce sont principalement des photos et des affiches de cinéma qui tapissent littéralement plusieurs espaces, avec un parcours chronologique retraçant la carrière de l’acteur aux 53 films. Lors de « l’inauguration » en 2011, l’actrice Françoise Deldick, qui avait tourné avec Bourvil dans La Grosse Caisse avait expressément fait le déplacement de Paris pour assurer son rôle de marraine du petit musée.
A noter que Françoise Deldick devait venir à Binche ce dernier week-end de novembre pour participer à un hommage à Bourvil. Elle faisait logiquement le déplacement de Paris avec Alix Mahieux, 94 ans, dont vous ne savez sans doute pas que c’était la partenaire de Bourvil dans la pièce La Bonne Planque. Les deux dames feront un crochet jusque chez Cyril Forthomme. Ce dernier nourrit le secret espoir qu’Alix Mahieux se décide à lui offrir une pièce rarissime en sa possession : il s’agit d’un verre décoré, en forme de souvenir, fabriqué en tirage très limité puisqu’il était offert aux acteurs lors de la première d’une pièce de théâtre. Le collectionneur possède déjà celui de l’opérette La Route fleurie et celui de la pièce de théâtre Le bouillant Achille, offert par la comédienne Perette Souplex, la fille de Raymond. Celui que possède Alix Mahieux lui a été offert lors de la première de La Bonne Planque. Assurément, voilà un objet qui trouverait vite une (belle) place dans le musée…
Cyril Forthomme chante aussi les chansons de Bourvil et du Grand Jojo lors de manifestations diverses. On peut le contacter via sa page Facebook ou par mail: forthomme.cyril@gmail.com
Bourville
Bourvil est né André Robert Raimbourg le 27 juillet 1917 à Prétot-Vicquemare, en Seine-Maritime, de parents cultivateurs. En 1918, son père décède de la grippe espagnole. Sa mère retourne alors dans le village de son enfance, à Bourville. Ce sera le nom de ce village normand auquel il reste très attaché que Bourvil adoptera comme nom de scène.
Mitron
Joyeux luron à l’école, le petit André Raimbourg n’en est pas moins excellent élève. Il entre au collège et se passionne d’emblée pour la musique, apprenant même à jouer du cornet à pistons. Mais l’internat lui pèse. Il décide alors de rentrer à la ferme familiale, à Bourville. ll rencontre Jeanne Lefrique, qui deviendra sa femme et se trouve un (premier) métier : boulanger.
Fernandel
Pendant son service militaire, Bourvil profite de quelques permissions à Paris pour jouer de la trompette et de l'accordéon avec son groupe Max Louisart et ses Boys. C’est en interprétant des chanson de son idole, Fernandel, qu’il va se faire connaître et commencer une carrière comme artiste. Plus tard les chansons de Bourvil deviendront de grands classiques comme La Tactique du gendarme, Le petit bal perdu, Salade de fruits, Les Crayons, A bicyclette, C’est l’piston ou encore La Tendresse.
Une cinquantaine de films
Peintre en bâtiment simplet dans La Grande Vadrouille, chef besogneux dans La Cuisine au beurre, idiot dupé dans Le Corniaud, mécano menteur dans Poisson d’avril, ami de Cadet dans Cadet Rousselle, ou encore cousin benêt de la débutante Brigitte Bardot dans Le Trou normand : Bourvil a tourné dans 53 films.
Pour sa première apparition au cinéma, en 1941 dans le film Croisières sidérales, il se contentera d’un (tout) petit rôle de figuration dans le personnage d’un scientifique. Pour la petite histoire, il se fait alors appeler Alain Grimor.
Bourvil rencontre Jean Gabin dans La Traversée de Paris, tourne beaucoup avec Louis de Funès et joue avec Jean Marais, Georges Wilson, Pierre Brasseur, Michael Lonsdale, Lino Ventura, Jean-Paul Belmondo, Alain Delon, Michel Galabru, Francis Blanche, Michèle Morgan, sans oublier bien sûr son maître, Fernandel.
Pendant longtemps, il incarne des rôles de naïfs, de gentils, voire de simplets. C’est le film La Traversée de Paris qui va le révéler comme acteur dramatique, avec cette consécration à la Mostra de Venise de 1956, sous la forme de la coupe Volpi de la Meilleure interprétation masculine. Dans le même registre, il sera Thénardier dans l’adaptation des Misérables de Jean-Paul Le Chanois. Ou encore le mari de Michèle Morgan dans le film dramatique Le miroir à deux faces. En 1970, c’est déjà très affaibli par la maladie qu’il interprétera ses deux derniers rôles : celui du commissaire Mattei dans Le Cercle rouge et d’un restaurateur normand dans Le Mur de l’Atlantique.